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Meeting payant du COJEP : un pari risqué pour Charles Blé Goudé
Hier, 09:58

Blé Goudé pourra-t-il relever le défi du meeting payant ?

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En annonçant l’organisation d’un meeting politique payant, en août 2025, pour célébrer les 10 ans du Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP), Charles Blé Goudé secoue les codes traditionnels de la politique ivoirienne. Présenté comme une première en Côte d'Ivoire, ce format inédit où les participants devront débourser 1000 FCFA pour accéder à l’événement, suscite autant de curiosité que de débat. Mais surtout un défi à relever sinon les conséquences pourraient être désastreuses pour l’image du COJEP et son leader.

Une « première » qui a déjà fait mouche à Dakar

Si Blé Goudé revendique une innovation dans l’espace politique ivoirien, la démarche n’est cependant pas totalement inédite sur le continent. Au Sénégal, le Pastef d’Ousmane Sonko et du président Bassirou Diomaye Faye a adopté une approche similaire à la veille des législatives anticipées de novembre 2024. Ce parti au pouvoir a non seulement fait payer l’entrée à ses meetings, mais a aussi levé des fonds importants (68 millions de FCFA collectés en seulement quatre jours) affirmant ainsi sa volonté d’échapper à la dépendance vis-à-vis des deniers publics.

La méthode du Pastef, qui vise à instaurer une culture de financement citoyen, semble désormais inspirer au-delà des frontières sénégalaises. Mais le parti au pouvoir au Sénégal n’est pas le COJEP qui est dans l’opposition et Blé Goudé n’est ni Bassirou Diomaye Faye ni Ousmane Sonko. Et le Sénégal n’est pas la Côte d’Ivoire et vice-versa.

Une stratégie aux multiples enjeux

Au-delà de la simple question financière, on peut comprendre le meeting payant de Blé Goudé au regard de ses explications. D’abord, il ambitionne de rompre avec la pratique décriée des « participants rémunérés » pour remplir les meetings. En fixant un prix d’entrée, le COJEP cherche à redéfinir l’engagement militant : venir au meeting devient un acte volontaire et une contribution directe à la survie financière du parti.

Ensuite, Blé Goudé dit utiliser ce système pour mettre fin à la traditionnelle « guerre des chiffres » qui alimente les controverses après chaque grand rassemblement politique. Ici, pas besoin de drone ni de comptage au doigt mouillé : la recette de la billetterie servira de baromètre incontestable. Il n’en demeure pas moins que c’est une initiative risquée. Même si Blé Goudé pense vouloir traduire une volonté de repositionnement dans l’arène politique ivoirienne. Longtemps perçu comme une figure mobilisatrice de la jeunesse pro-Gbagbo, le président du COJEP semble chercher un nouveau modèle, où le militantisme rime avec responsabilité financière. C’est également une façon de préparer son parti à une plus grande autonomie, loin des financements opaques et des influences extérieures.

Mais le succès de cette démarche dépendra de la capacité du COJEP à convaincre ses sympathisants de l’utilité de cet effort financier et de leur fidélité à long terme. Si l’opération échoue, elle pourrait être interprétée comme un signe de faible implantation ou de désengagement des bases militantes.

Vers une nouvelle culture politique ?

Que ce soit au Sénégal avec le Pastef ou en Côte d’Ivoire avec le COJEP, ces expériences traduisent peut-être l’émergence d’une nouvelle culture politique en Afrique, fondée sur le financement populaire et la responsabilisation des militants. Une dynamique qui tranche avec les pratiques souvent dénoncées et qui, si elle s’installe durablement, pourrait redessiner les rapports entre les partis et leurs électeurs.

Dans tous les cas, c’est un pari risqué pour Blé Goudé et son COJEP. Cependant s’il parvient à relever ce défi, il redéfinira les relations entre les partis politiques et leurs bases. 

Modeste KONE

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