Laurent Gbagbo veut se positionner comme le leader de l'opposition
Le président du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), Laurent Gbagbo, a lancé, depuis Bonoua, où il a animé un meeting, dimanche 14 juillet 2024, un appel à l’union de l’opposition. Ce qui en soit est légitime. Car, ce n’est un secret pour personne qu’aucun parti politique, seul, ne peut détrôner le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), au pouvoir depuis 2010. D’ailleurs, de l’avis d’observateurs avisés, aucun parti politique ne peut, aujourd’hui, gagner seul une élection présidentielle en Côte d’Ivoire. C’est en formant un bloc que les différentes formations de l’opposition ivoirienne pourront venir à bout du pouvoir d’Alassane Ouattara. C’est donc à juste titre que l’ancien chef d’Etat invite les autres partis politiques à unir leurs forces. Mais, là où se pose le problème, c’est comment ce dernier lance son appel et dans quel contexte.
Ce week-end, depuis Bonoua, Laurent Gbagbo a passé un message à l’endroit de la classe politique : « Je vais profiter de la terre de Bonoua pour dire à tous les hommes politiques que j’ouvre les bras. Tous ceux qui veulent un rassemblement, clair, politique, sain pour battre ce gouvernement, j’ouvre les bras, je les attends ». Son message est clair. C’est à lui que doivent venir les autres partis politiques afin qu’ils forment un bloc. Lui, se mettant certainement dans la position de leader de l’opposition ou même d’ancien chef d’Etat, attend que les autres formations viennent à lui. Il va plus loin en imposant des conditions : « Mais attention, il ne faut pas essayer de faire la roublardise avec nous. On ne me roule pas. Je peux me tromper, mais on ne peut pas me rouler. Il faut être clair, net, franc et loyal ». Mais, vue la réalité du terrain, Laurent Gbagbo peut-il vraiment se prévaloir de ce statut de leader de l’opposition ? Quand on sait surtout que le PPA-CI n’est plus le Front populaire ivoirien (FPI) des années 90 ou des années 2000 quand il était au pouvoir. Ne surestime-t-il pas son poids ? En tout cas, des observateurs de la scène politique ivoirienne jugent ses propos prétentieux.
Dans le contexte même dans lequel il lance cet appel, Laurent Gbagbo est-il raisonnablement bien placé pour appeler à l’union de l’opposition. Lui qui, depuis son retour, refuse de rencontrer ses ex-compagnons devenus aujourd’hui des leaders de partis d’opposition. Son épouse Simone Gbagbo est aujourd’hui présidente du Mouvement des générations capables (MGC). Blé Goudé, son co-détenu à la prison de Scheveningen, à la Haye, en Hollande, est le président du Congrès pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP). Affi N’Guessan demeure le président du Front populaire ivoirien (FPI), parti que lui-même Gbagbo a contribué à créer. Tous mobilisent à chacune de leurs sorties. Depuis qu’il a foulé le sol ivoirien, il n’a toujours pas renoué le dialogue avec eux. Même ceux qui ont émis le vœu de le rencontrer n’ont toujours pas réussi à établir le contact. Dans de telles circonstances, peut-il vraisemblablement être celui qui peut réunir autour de lui l’opposition ivoirienne pour affronter la machine du RHDP. Non. A première vue. Mais, nous sommes en politique. Ne sait-on jamais.
Modeste KONE