Le président de la CEI donne…la voie





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C’est vrai. Ibrahime Coulibaly-Kuibiert et la Commission électorale indépendante sont de purs produits de l’Etat et ses dirigeants qui ont pris la décision en 2020 de rayer le nom et le prénom de l’ancien président du FPI sur la liste électorale définitive.

Il est tout aussi vrai que dans cette opération de relégation de l’ancien président ivoirien sur le banc de touche, Coulibaly-Kuibiert et son institution n’y sont pour rien. Ils ne font qu’appliquer ou respecter les termes d’une décision de justice du reste fort contestée.

Mais, entre nous, ne sont-ils vraiment que d’aveugles exécutants dans la cour du roi ? En matière électorale, n’ont-ils pas montré par le passé et encore aujourd’hui, leur force de proposition à l’Etat et aux parties prenantes dans le fonctionnement de l’institution électorale ?

Pas plus tard que samedi 20 mai 2023, le magistrat Ibrahime Coulibaly-Kuibiert, sans doute acculé par l’opinion qui pense peut-être à raison qu’il joue le jeu du pouvoir qu’il représente dans cette institution, a fait une excellente proposition non seulement au parti de Laurent Gbagbo mais aussi à ses mandants et à l’opinion publique.

Le président de la CEI, particulièrement inspiré, a indiqué que l’institution qu’il dirige fonctionne sur le fondement de deux règles : celle dite de droit et celle relevant purement de la politique. Ainsi, comme pour appeler les uns et les autres à trouver une solution définitive à ce conflit qui pourrait enflammer le pays, le magistrat-président conseille-t-il : « Ce qui ne peut pas se résoudre juridiquement peut se résoudre politiquement ».

L’on ne peut s’empêcher de penser que Coulibaly fait ainsi un clin d’œil au dialogue politique qui réunit partis politiques et Etat et qui devrait s’intéresser à la résorption de tels conflits naissants. D’ailleurs, les partisans de Laurent Gbagbo sont furieux contre cette exclusion de leur champion parce qu’ils estiment que pour l’enracinement de la paix, le chef de l’Etat aurait dû faire réinscrire son devancier.

Au PPA-CI où tous les militants sont vent debout contre la justice et le pouvoir, l’on ne comprend pas que Ouattara refuse de faire une passe décisive à Gbagbo qui, à travers la prise de l’article 48 de la Constitution en 2005, lui avait permis d’être « un candidat exceptionnel » à la présidentielle de 2010. Pour eux, la décision est d’autant facile à prendre que la faute pour laquelle l’ancien pensionnaire de la CPI a été condamné n’a jamais existé.

Leurs avocats insistent pour dire que «la BCEAO n’a jamais porté plainte pour braquage et ne s’est pas portée partie civile dans le procès qui a conduit à la condamnation » de Laurent Gbagbo en 2018 alors qu’il était encore aux prises avec la CPI. Un journal français révèle même qu’après enquête, l’institution bancaire ouest-africaine n’a pas noté d’anomalie dans ses caisses.

C’est pour toutes ces raisons que la proposition du président de la CEI est la bienvenue. Le clin d’œil de Coulibaly pourrait même aller en direction de la société civile notamment des religieux. On se souvient qu’en Guinée, les religieux ont pris leur courage à deux mains pour engager des négociations avec le pouvoir afin d’obtenir la libération des membres de la société civile en prison.

Dans la première moitié du mois de mai 2023, ces hommes de Dieu ont eu gain de cause. Fort de leur expérience d’hommes de terrain, ils ont décidé d’anticiper pour éviter à leur pays de voir couler encore à flot du sang guinéen. Les religieux ivoiriens qui sont très bien organisés, pourraient emboîter le pas à leurs homologues et faire tomber la fièvre politico-sociale.

Les moyens et les arguments juridiques, politiques ne leur manqueront pas pour obtenir du chef de l’Etat qu’il rétablisse son prédécesseur dans ses droits civils. Et nos religieux devraient aller plus loin pour négocier pied à pied le retrait du jeu politique de ceux qu’on appelle « les trois grands ».

Cette formule a le charme de rebattre les cartes, d’éloigner les tensions et de faire que les politiques s’intéressent à se réorganiser en interne. Un travail qui, visiblement, n’est pas de l’eau à boire. Cette formule libère dans le même temps le chef de l’Etat du poids de la pression et du regard malveillant de ses partisans qui seront obligés de n’y voir que justice.

Il ne reste plus aux hommes de Dieu qu’à prier intensément Dieu afin qu’il leur donne la force nécessaire de suivre la voie…donnée par Kuibiert et de trouver les mots qui conviennent pour transformer magistralement l’essai. A moins qu’ils ne considèrent la voie Kuibiert comme une bataille contre le vent.

 Abdoulaye Villard Sanogo

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