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La lutte traditionnelle nigérienne, entre héritage et ferveur populaire
Aujourd'hui, 07:08

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Au Niger, la lutte traditionnelle, appelée Kokowa et communément désignée comme le sabre national, dépasse le simple cadre sportif. Elle est à la fois un héritage culturel, un rituel populaire et un puissant facteur de cohésion sociale. Institutionnalisée en 1975 sous le régime du Général Seyni Kountché, elle s’est imposée au fil des décennies comme le sport roi du pays.

Chaque année, la compétition se déroule à tour de rôle dans une région du Niger, sur une période allant de dix à quatorze jours. Huit équipes régionales, composées chacune de dix lutteurs sélectionnés par compétition, défendent les couleurs de leur terroir dans une arène qui devient, le temps de l’événement, le cœur battant de la nation.

Avant même le combat, le spectacle commence. Les lutteurs font leur entrée en cadence au son du tam-tam ganga, exécutent des pas de danse, accomplissent des gestes mystiques et exhibent leurs muscles, mêlant démonstration de force et symbolisme traditionnel. Le combat oppose ensuite deux adversaires pour une durée maximale de dix minutes, sous l’œil vigilant de l’arbitrage.

À l’issue du duel, le vainqueur relève et console parfois le perdant, dans un geste de respect profondément ancré dans la tradition.  A sa sortie de l’arène, le vainqueur est célébré par ses supporters, qui n’hésitent pas à « faroter » en jetant des billets, marque de reconnaissance et de fierté collective.

Au terme de la compétition, le lutteur resté invaincu remporte le Sabre National, distinction suprême de la lutte traditionnelle nigérienne. Contrairement à d’autres disciplines sportives, il n’existe pas de trophée : le sabre constitue à lui seul le symbole de la victoire. Le champion reçoit également une importante somme d’argent ainsi que de nombreux cadeaux en nature et en espèces offerts par ses supporters et partenaires.

Au-delà de l’aspect sportif, le Kokowa porte une dimension culturelle profonde. Bien avant son institutionnalisation, il rythmait la vie des communautés rurales, opposant villages voisins lors des fêtes de récolte, sous l’autorité des anciens. Aujourd’hui encore, des expressions culturelles telles que le kirari joutes verbales mêlant éloges, défis et piques entre régions  ainsi que la diversité des tenues traditionnelles contribuent à préserver l’authenticité de la lutte tout en renforçant le sentiment d’unité nationale.

Ces dernières années, les règles ont connu des ajustements visant à promouvoir le fair-play et à encadrer davantage les combats, tout en respectant l’esprit originel de la discipline. Si certaines figures emblématiques regrettent les anciennes règles, sans temps mort ni possibilité de match nul, ces évolutions traduisent la volonté d’adapter la lutte aux exigences contemporaines.

Cette année, la région de Tahoua accueille la 46ᵉ édition du Sabre National dans l’arène Hamidine Maidaré. L’événement, ouvert le 19 décembre, se poursuit jusqu’au 28 décembre, dans une ferveur populaire exceptionnelle. Plus qu’une compétition sportive, il s’agit d’une véritable fête nationale, générant un impact économique notable et transmettant, de génération en génération, des valeurs de bravoure, de respect et de solidarité.

 

Balkissa Ibrahima Mahamane

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