La question du retour des athlètes russes et biélorusses dans les compétitions internationales occupe le mouvement olympique, depuis plusieurs mois. Le Comité international olympique a recommandé le 28 mars 2023, la réintégration des sportifs russes et biélorusses aux compétitions internationales, sous bannière neutre et « à titre individuel », pour peu qu'ils n'aient pas activement soutenu la guerre en Ukraine.
Auparavant, les membres de l'Association des comités nationaux olympiques d'Afrique (Acnoa), réunis à Nouakchott, le 2 mars, se sont prononcés à l'unanimité en faveur de la participation des athlètes russes et biélorusses à toutes les compétitions internationales. « Il s'agira ainsi de permettre aux athlètes russes et biélorusses de participer en toute neutralité sans aucun signe identitaire aux Jeux olympiques de Paris 2024 », a indiqué l'Acnoa dans un communiqué, rejoignant ainsi le Conseil olympique d'Asie (Coa) qui avait proposé fin janvier d'intégrer les athlètes russes et biélorusses à ses compétitions régionales comme les Jeux asiatiques, pour exprimer son soutien à la position du Cio.
Interrogé en marge de l’Assemblée générale mixte du Comité national olympique de Côte d’Ivoire, samedi 29 avril à Cocody, le président Georges N’goan a affirmé que l’institution qu’il dirige partage la position du Cio, « En tant que Comité national olympique de Côte d’Ivoire, nous sommes obligés de partager la position de l’Acno sur cette question. Il faut dire que c’est le Comité international olympique qui a donné les directives concernant cette affaire. Nous sommes donc obligés de suivre parce que c’est le Cio qui le recommande. Nous sommes membres du Comité international olympique. C’est la Commission exécutive du Cio qui a pris cette décision, et nous sommes obligés de suivre », a soutenu, insistant sur la volonté du Cno-Civ de suivre la recommandation de l’instance basée à Lausanne (Suisse) sur la réintégration des sportifs de ces deux pays.
Par ailleurs, le patron de la représentation ivoirienne du Cio s’est prononcé sur le Rodchenkov Act, une loi controversée sur le dopage (promulguée le 4 décembre 2020 par le président Donald Trump), permettant aux Etats-Unis de poursuivre hors de leurs frontières toute personne quelle que soit sa nationalité, impliquée dans un système de dopage à l’échelle internationale. « Nous ne sommes pas concernés par cela, nos athlètes ne sont pas dopés… », a-t-il tranché.
Georges N’goan est satisfait que le Cno-Civ soit sorti de l’Ag mixte du 29 avril avec « des textes modernes et conformes à la charte olympique qui vont permettre d’évoluer ». « Nous avons un instrument juridique qui va permettre au Cno-Civ d’être moderne et surtout efficace », s’est-il réjoui, avant d’inviter les populations de Dimbokro à participer massivement à la 1re édition du Festival des sports olympiques organisé par le Cno-Civ du 5 au 7 mai 2023, dans la cité du N’zi.
Des athlètes de 4 continents donnent leur position au Cio
Depuis plusieurs mois en Europe, le monde politique s’est invité dans le débat sur le retour des athlètes russes et biélorusses dans les compétitions internationales. Deux camps se sont formés. La question occupe le mouvement olympique. Qu’en pensent les athlètes ? Le Comité international olympique (Cio) a en interrogé quelques-uns, en activité ou récemment retraités. Ils sont issus de quatre continents et représentent cinq sports olympiques, d’hiver ou d’été.
Martin Fourcade (Biathlon, France). « En tant que représentant des athlètes et sportif, je suis fermement convaincu que nous devrions envisager d’autoriser les athlètes russes et biélorusses à participer aux compétitions sportives. Bien que je comprenne le caractère sensible de cette question compte tenu de la guerre en cours en Ukraine, j’estime qu’exclure ces athlètes de la compétition en raison de leur passeport ou de leur nationalité est discriminatoire et va à l’encontre des valeurs fondamentales du sport », indique Martin Fourcade (Biathlon, France) qui fait remarquer : «En tant qu’athlètes, nous partageons tous un lien commun et notre nationalité ou nos convictions politiques ne devraient pas nous empêcher de concourir les uns contre les autres. Pendant mes 15 années de carrière sportive, j’ai concouru pour la France, mais je n’ai jamais défendu sur la ligne de départ les positions ou décisions de mon gouvernement. J’ai concouru comme athlète, être humain et adversaire pour tous ceux qui s’alignaient à mes côtés ». Membres de la commission des athlètes du Cio, il pense également qu’il est important de montrer au peuple russe que les athlètes de leur pays et les athlètes du monde entier peuvent s’élever au-dessus de la politique et de la propagande pour concourir sur un terrain de compétition juste et équitable. « … Mon opinion est ce qu’elle est en raison de mon attachement aux valeurs olympiques. Je sais que cela n’atténue pas les difficultés du peuple ukrainien et de la terrible guerre à laquelle il est confronté. Je suis à 100 % avec eux. Et je veux être totalement clair sur ce message, car nous vivons dans un monde où certaines choses sont soit noires, soit blanches, il n’y a pas de zone grise. Le fait que je soutienne le retour des athlètes russes et biélorusses ne signifie pas que je soutiens la guerre. Ce n’est pas le cas, et ne le sera jamais. », souligne Martin Fourcade à olympics.com.
Mohamed Ghaleb Mohamed Al-Qarnas (Boxe, Yémen), pense qu’en tant qu’athlète, la participation des athlètes russes aux compétitions internationales devrait être autorisée, mais sans médailles… « Le fait d’être en faveur du retour des athlètes russes ne signifie pas pour autant que l’on soit en faveur de la guerre », explique le boxeur yéménite.
Kirtie Algoe, Taekwondo in du Suriname déclare qu’en tant qu’êtres humains et athlètes, il est naturel que nos pensées aillent aux victimes du conflit et à la communauté sportive en Ukraine. « En même temps, j’ai été très déçue lorsque j’ai appris que le Cio avait appelé à une interdiction totale des athlètes russes. Selon moi, cette action contredisait le principe de neutralité politique énoncé dans la Charte olympique. Je suis heureuse que le Cio ait reconsidéré la question et envisagé la possibilité d’autoriser les athlètes russes et biélorusses à concourir sous un drapeau neutre », dit Kirtie qui estime que « la neutralité politique est cruciale pour le sport et pour le Cio ». Elle encourage de « garder à l’esprit que les Jeux olympiques ne sont la propriété d’aucun pays. Ils appartiennent à la communauté sportive et les principaux représentants de cette communauté sportive sont les athlètes, que leur pays soit dirigé par un leader non démocratique ou non. Les athlètes devraient avoir le même droit de participer et la plateforme des Jeux olympiques devrait être un espace sûr ». Kirtie Algoe dit être consciente que son opinion peut ne pas être populaire auprès de certains de ses collègues athlètes, mais pour elle, « il est clair que nous ne pouvons pas permettre aux Jeux olympiques de devenir un instrument de guerre politique ».
La volleyeuse camerounaise Victoire L’or Ngon Ntame justifie la réintégration des athlètes russe en évoquant la Déclaration universelle des droits de l’homme qui stipule que tous les êtres humains sont libres en dignité et en droits, sans distinction aucune.... « La Charte olympique qui stipule aussi que la pratique du sport est un droit de l’homme, montre clairement que le Mouvement olympique a tout à fait le droit d’autoriser les athlètes munis de passeports russes ou biélorusses à participer à des compétitions sportives », rappelle-t-elle, à olympics.com avant de préciser : « Les trois valeurs olympiques sont l’excellence, l’amitié et le respect. Pour moi, ces valeurs s’étendent à tout être humain, sans discrimination. (…) Les athlètes ne doivent pas faire les frais des conflits entre gouvernements. Il est injuste de briser le rêve olympique d’un athlète à cause d’une situation dont il n’est pas responsable. Nous espérons que le gouvernement ukrainien placera les intérêts de ses athlètes au-dessus des intérêts politiques. Je me souviens de la façon dont la Corée du Nord et la Corée du Sud ont mis de côté leurs griefs pour participer ensemble aux Jeux olympiques. J’espère et je souhaite que les athlètes ukrainiens et russes puissent faire preuve de grandeur en respectant de la même manière les valeurs olympiques et le fair-play. Mais je sais que, dans les circonstances extrêmement difficiles auxquelles les athlètes ukrainiens sont confrontés, cela ne sera pas facile. »
Source ; L'inter