Exception sénégalaise : un président, deux premières dames





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C’est un tremblement de terre, ce qui vient de se passer au Sénégal. Un mouvement dit anti-système, vient de balayer le système. C’est qu’au terme de l’élection présidentielle qui s’est déroulée dimanche 24 mars 2024 dans le pays de la téranga, c’est un « jeune homme de 44 ans », polygame connu, qui est porté à la tête du pays. Il remplace ainsi le très controversé Macky Sall, l’homme du système qui a failli emporter le Sénégal avec lui par ses maladresses.

Le protocole de l’Etat sénégalais doit être déjà au travail pour régler une équation qui va venir très rapidement sur son bureau : la gestion des deux premières dames. Deux belles dames, Marie Khone Faye et Absa Faye, qui devraient se relayer aux côtés de leur mari Faye à chaque sortie officielle. Le protocole devrait étendre sa stratégie là où le vrai pouvoir se localisera puisque Ousmane Sonko aussi vit avec deux épouses. La révolution de palais est en marche au Sénégal.

Même si un système aussi vieux que celui du pays de Senghor ne se balaie pas du jour au lendemain, il faut reconnaître cependant que ce qui se passe sous nos yeux est exceptionnel. Bassirou Diomaye Diakhar Faye, le candidat arrivé en tête, n’est qu’un « pneu secours », un plan B. Il est sorti du chapeau d’Ousmane Sonko, président des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), recalé par un complot ourdi contre sa personne. On peut le dire, Faye est un président par défaut que le peuple sénégalais vient de se donner.

Le désormais président Bassirou Faye devra donc faire avec Sonko, son mentor. L’on ne s’imagine pas un seul instant, en tout cas dans des cercles politiques sérieux, Bassirou Faye faire un pas sans Sonko, ou prendre une décision sans l’aval de son mentor. Là-bas, au Sénégal, on n’hésite même pas à dire que le vrai président de la République, c’est Ousmane Sonko. Et que le pouvoir sera là où sera Sonko. Pourvu seulement que le couple Sonko-Faye et leurs alliés s’entendent sur la question qui, de notre point de vue, devrait trouver facilement réponse.

On le sait, le couple a un programme tourné résolument à gauche. C’est un programme révolutionnaire. Exit les passe-droits et retour à l’usage ordinaire c’est-à-dire au droit, à l’éthique. Plus question de se coucher devant l’ogre français condescendant, retour au partenariat gagnant-gagnant. Exit aussi les contrats léonins passés avec les entreprises occidentales qui ne sont jamais contrariées par la souffrance des peuples dont elles exploitent les terres. Cet objectif est d’autant atteignable pour les dirigeants du Pastef qu’aujourd’hui, la France n’est plus que l’ombre d’elle-même. Elle n’a plus que des dents de lait.

Autant de sujets résumés dans un programme de gouvernement que le nouveau président se devra de mettre en œuvre. Même s’il a pris la tête de l’Etat sans coup férir lors d’une élection bien maîtrisée, le nouveau pouvoir devra savoir une chose : entre un souhait transformé en programme et sa réalisation, beaucoup de temps peut se griller. Il y a donc loin de la coupe aux lèvres. Privilégier de petites choses qui touchent à la vie quotidienne des Sénégalais serait mieux qu’un bon coup de pied dans la fourmilière tout de suite.

C’est connu aussi que les nouveaux dirigeants auront la pression du peuple qui voudra des changements tout de suite pour des résultats concrets. Mais il leur appartient de savoir communiquer leur vision d’un Sénégal nouveau avec de nouvelles méthodes de travail. Car comme l’enseigne l’histoire, une révolution entraîne toujours derrière elle, une contre-révolution. Et les contre-révolutionnaires, il y en aura beaucoup, à commencer par le système battu et ses penseurs. Même si ceux-ci n’ont plus de solides dents pour mordre mortellement, ils restent du lait sur le feu. A surveiller avec une singulière attention.

Abdoulaye Villard Sanogo


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