L’érection de Bangoua en sous-préfecture pourrait donner un coup d’accélérateur au développement du village, selon le président de la mutuelle, Bernard Manizan
Les populations de Bangoua, localité située dans le département d’Agnibilékrou (Indénié-Djuablin) et comptant plus de 15 000 âmes selon le dernier recensement sont impatientes de voir leur village érigé en sous-préfecture. Sur instruction des autorités compétentes, différentes missions ont été menées à Bangoua, un village-centre qui regroupe huit villages et plus de trente gros campements, en vue d’en faire une sous-préfecture pour répondre aux besoins des populations. Cette politique vise à rapprocher l’administration des populations. Malheureusement, cela fait plus d’une décennie que les populations attendent.
Rattaché à la sous-préfecture de Duffrébo, le village de Bangoua s’est agrandi au fil des années et a su créer dans son sillage plusieurs villages et gros campements. Autrefois petit village charmant incrusté dans le creux d’une vallée, dans un bassin versant à la lisière de la rivière dont il porte le nom, le village a pris des allures d’une cité moderne : connexion électrique, eau potable, collège et une attractivité touristique au sens vrai du terme.
Historique
Les autochtones sont des Abè. Contrairement aux Abè d’Agboville, ils vivent le long de la rive du fleuve Comoé. L’histoire nous apprend qu’en termes d’antériorité, les Agni-Abè ont été les premiers à fouler le sol de l’Indénié-Djuablin. C’est à la suite de leur refus de s’y établir (Abè n’glô) qui littéralement traduit : les Abè n’ont pas voulu ou ce qui a été rejeté par les Abè que les peuples Indénié et Djuablin ont colonisé le territoire. C’est un royaume avec à sa tête Nanan Mlo Koffi Kouamlan II. Le siège se trouve à Katimansou, dans le département de Daoukro, dans la région de l’Iffou, de l’autre côté de la rive.
Les difficultés
Autrefois fier de ses vestiges ancestraux, Bangoua a pris l’allure d’un village moderne. Distant de 65km de son chef-lieu de sous-préfecture, en passant par Agnibilékrou, les populations éprouvent d’énormes difficultés à s’y rendre pour établir les documents administratifs. Déclarer les naissances à l’état civil ou établir un document administratif à la sous-préfecture relève d’un parcours du combattant. Les parents sont obligés de faire un grand détour à Agnibilékrou, puis à Apprompronou, avant d’espérer emprunter un véhicule pour la sous-préfecture. Un vrai cauchemar.
Les populations peinent à écouler leurs productions. Elles sont livrées à des acheteurs véreux faute de route praticable. En période de pluies, la situation devient des plus inquiétantes avec des flaques d’eau semblables à des piscines olympiques. La mobilité s’en trouve considérablement réduite. Par endroits, de hautes herbes, voire des arbustes, ont fini par coloniser la voie, il faut conjuguer avec la prudence. L’axe Bangoua-Agnibilékrou est dans un état impraticable. L’axe Bangoua-Duffrèbo n’existe que de nom, juste une piste tracée à la faveur des acteurs des scieries dans la zone.
Face à toutes ces difficultés, le chef sollicite l’érection de son village en sous-préfecture. Ce qui aura l’avantage de soulager les populations et les autres habitants des villages et campements qui gravitent autour de ce village-centre.
La présence d’un sous-préfet aura cet avantage d’imprimer le rythme de développement du village, notamment un poste de gendarmerie pour combattre l’insécurité dans la zone. Cette présence des hommes en armes aura l’avantage de dissuader les petits voyous et certains voleurs de grands chemins qui voudraient faire de cette zone leur passage obligé de trafics de tout genre. Étant une zone agricole assez prospère, la présence de gendarmes pourra dérouter ces bandits de grands chemins qui apparaissent pendant les périodes de grandes récoltes des produits de rente. Selon les statistiques de l’OCPV, c’est le village grenier de la zone. Aussi, ne perdons pas de vue que le village est à la croisée de plusieurs carrefours dont des chemins qui mènent au Ghana voisin que certains trafiquants malveillants voudraient emprunter pour écouler leurs sales marchandises.
La présence de l’administration aura cet appui nécessaire de faire du centre de santé un hôpital général avec des services de soins diversifiés pour le bonheur des populations. Faut-il le rappeler, près d’une cinquantaine de gros campements gravitent autour et dépendent du seul centre de santé de Bangoua qui ne répond plus aux besoins des populations dont le nombre croissant demande un personnel médical plus renforcé, également un hôpital général équipé d’un plateau technique adéquat pour une meilleure prise en charge sanitaire.
Le problème d’eau connaîtra une nette amélioration. Pour l’heure, l’alimentation en eau est assurée par une HVA (Hydraulique Villageoise Améliorée) avec une capacité insuffisante pour alimenter tout le village. Dès les premières heures de la journée, le stock d’eau est épuisé et il faut attendre dans la soirée pour un second passage. Si l’objectif des HVA c’est de permettre aux populations rurales de disposer d’eau potable de façon pérenne, à Bangoua, l’objectif n’est pas au Rdv. Ce qui rend la tâche très difficile aux femmes de ménage qui continuent d’utiliser l’eau de la rivière avec tous les risques que cela comporte, notamment la présence de ces orpailleurs véreux dans la zone. Certains ont fini par faire des puits au sein de leur concession mais la qualité de l’eau laisse à désirer. La solution pourrait donc venir d’un château d’eau en bonne et due forme. Le sous-préfet sera la personne indiquée pour suivre ces vastes projets de développement.
Les atouts
En termes d’infrastructures, le village dispose de deux écoles primaires, d’un collège privé, d’un collège de proximité (en construction), d’une maternelle, d’un centre de santé dirigé par un infirmier et une sage-femme. Le village bénéficie d’une adduction en eau potable à travers une pompe HIV et d’une connexion électrique qui nécessite une extension.
En termes d’attraits touristiques, Bangoua dispose de plusieurs sites dont des forêts sacrées qui constituent un poumon d’oxygène naturel. Le plan d’eau auquel s’identifie le village constitue à lui seul un attrait touristique vu les caractéristiques paradisiaques qui le constituent, notamment à son point embouchure avec le fleuve Comoé. La terre nourricière aussi. De vastes champs de produits de rentes et vivriers témoignent de la bravoure des populations constituées en majorité d’autochtones. L’hospitalité est le maître-mot de la région. Nos frères allochtones ainsi que ceux venus de la sous-région communément appelés CEDEAO y vivent en parfaite harmonie avec leurs hôtes. Ces frères qui nous font l’amitié de vivre avec nous sur la terre de nos ancêtres se sont bien intégrés. Le vivre-ensemble est réel !
Tous ces atouts, à en croire les populations, prédisposent le village à accueillir un sous-préfet pour impulser son développement. C’est le vœu tant caressé par les populations depuis près d’une décennie.
Pour démontrer leur capacité à accueillir un sous-préfet, nos parents ont entrepris la construction des locaux. Sous l’impulsion de l’ancien chef, feu Nanan Kwame Ahiray, ils ont jeté les bases. Cela fait plus d’une décennie que ce projet est en chantier. La lenteur administrative, aurait-elle douché l’ardeur des populations ? Nul ne pourra répondre avec certitude. Mais tout compte fait, le projet leur tient à cœur. Avec le soutien de la mutuelle des cadres, les travaux ont repris. Pour montrer sa bonne foi à accueillir son commandant, le village a mobilisé deux villas de particuliers pour en faire les bureaux et le logement du futur administrateur.
Rappelons que le département d’Agnibilékrou compte plusieurs villages Agni-Abè qui cohabitent dans un environnement de paix avec leurs frères du Djuablin. Malheureusement, tous ces villages Abèman ont pour seul chef-lieu de sous-préfecture Duffrèbo. De l’autre côté de la rive, dans le département de Daoukro, c’est le même problème, d’où l’appel du Roi de l’Abèman, Mlo Koffi Kouamlan II pour l’érection de Bangoua en sous-préfecture, ainsi que Katimansou, le siège du royaume Agni-Abè pour un véritable rayonnement de son royaume, l’Abèman.
Contribution de Bernard MANIZAN,
Président de la Mutuelle de Bangoua
MUREBA