Geneviève Bro Grébé : ‘’Voici la recette pour une vraie réconciliation’’





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Quelques semaines après la mise en place du mouvement citoyen pour la nouvelle Côte d’Ivoire  (MCNCI) Geneviève Bro Grébé parle.  Sans langue de bois, elle nous donne la recette pour une vraie paix en Côte d’Ivoire  

Ancienne présidente de la coordination des femmes patriotes de Côte d'Ivoire, vous avez décidé de lancer le Mouvement citoyen pour une nouvelle Côte d'Ivoire (Mcnci). A quoi répond cette nouvelle initiative ? 

C’est  une initiative qui répond à l’appel des Ivoiriens qui aspirent à la paix. Les Ivoiriens ont trop souffert des turbulences qui ont abouti à la guerre. Les gens ont souffert de la perte des êtres humains, des êtres chers, de la perte de bien matériels et de la perte de la cohésion sociale. Aujourd’hui, avec  tout ce que nous voyons encore,  ce que nous avons vu récemment  avec les élections municipales et régionales, les Ivoiriens ont peur.  Ils ont besoin d’être apaisés et rassurés. Et nous,  nous pensons que nous répondons à cet appel en essayant d’apaiser les cœurs. Nous le faisons en tant que des gens qui ont souffert des affres de cette guerre parce que nous avons tout perdu. Nous avons perdu même notre dignité.  Nous avons été en prison.  Nous avons été battus. Nous disons qu'il faut aller de l'avant. Nous ne pouvons pas continuer à alimenter la haine. Donc, on rentre en soi en se disant, faut-il continuer dans la belligérance, dans la haine ? Nous disons non. Si on veut vivre, il faut pardonner. Il faut pouvoir parler aux autres pour demander à tout le monde d'arrêter les dégâts. Il y a eu la guerre, il faut pouvoir se parler pour aller à la paix dans l’intérêt de notre pays et aussi dans le nôtre. Le pardon est une force de résurrection. Le pardon, il est divin. Donc, nous pensons qu'aujourd'hui, nous qui avons beaucoup souffert, nous voulons pardonner pour aller de l'avant. 

Quand est-ce qu'est née votre mouvement ? 

Le mouvement est né il n'y a pas longtemps avec des personnes de bonnes volontés composé des femmes patriotes et ''les amis de Mouvement ivoirien pour la défense des institutions (Midi) qui a travaillé longtemps pour le changement des mentalités en Côte d'Ivoire. Nous sommes convaincus que ces crises à répétions sont arrivées parce que nous tous avons adopté de mauvais comportements.  Il faut les changer. On ne pourra pas faire la réconciliation sans qu'on change de mentalités. Notre objectif,  c'est de contribuer à la réconciliation et de faire en même temps la promotion d’un citoyen nouveau. 

La réconciliation n'est-elle pas effective en Côte d'Ivoire huit ans après la crise post-électorale ?

Non, il y a eu beaucoup d’initiatives qui ont été créées, notamment celle du gouvernement à travers la Commission dialogue vérité et réconciliation (Cdvr). Mais,  nous n’avons toujours pas les rapports. Est-ce que les Ivoiriens connaissent le contenu de ce rapport ? Est-ce que les dédommagements ont été faits ? Est-ce qu'il y a eu réparations ?  Il y a eu beaucoup d'écoute mais qu'est-ce qui a été fait après ?  Nous avons tout perdu. Personnellement, nous n'avons pas été dédommagés. Et, c'est le cas de plusieurs personnes. 

Alors, qu'est-ce qu'il faut pour une vraie réconciliation en Côte d'Ivoire?

Pour une vraie réconciliation, il faut  d'abord la vérité. La vérité, ça rougit les yeux mais ça ne les casse pas. Il faut se dire les vérités. Il faut qu'on s'asseye entre frères et sœurs et qu'on  se dise les vérités. Et puis qu'on se demande pardon mutuellement pour aller de l'avant. Si vous avez un abcès et que vous vous contentez de nettoyer la surface, si l'abcès n'est pas crever, la plaie se transforme en cancer.

La vérité dont vous parlez se résume en quoi ? 

Chacun à sa vérité mais je pense que quand on se mettra ensemble, on se parlera. On ne pourra pas faire l'économie d'un rassemblement des filles et des fils de la Côte d'Ivoire. Si on ne se parle pas, s'il n’y a pas de communication, on ne peut pas s'entendre. Il faut qu'il y ait une communication, une vraie communication entre les enfants de Côte d'Ivoire. 

Avec la création du Mouvement citoyen pour une nouvelle Côte d'Ivoire, est-ce à dire que  le mouvement des femmes patriotes n'existera plus ? Comment gérez-vous tout cela ? 

Nous venons de loin. Au lendemain du coup d’Etat du 24 décembre 1999, nous avons créé '' Femmes paix et vision,'' une organisation de la société civile. Nous avons travaillé  pour suivre  la junte militaire, pour les amener à respecter leur parole. Nous avons fait cela pendant dix mois. Après cela, nous n'étions plus sur le terrain puisque notre objectif était vraiment de suivre la junte militaire pour ne pas qu'elle s'éternise au pouvoir. Malheureusement, il y a eu le 19 septembre 2002, nous nous retrouvons avec les femmes du Pdci, du Fpi, de la société civile, le Réseau ivoirien des organisations féminines, les femmes du Pit, celles de l'Usd, pratiquement tous les partis qui comptaient en ce moment en Côte d'Ivoire. Et, nous avons créé la Coordination des femmes patriotes pour dire non à la rébellion. Maintenant, nous arrivions au moment, j'espère où la rébellion est terminée. On eu des accords, on a voulu aller à la paix, finalement elle n'est jamais revenue et nous avons connu la guerre avec son lot de meurtrissure, de tristesse et de désolation. Et,  nous recherchons aujourd'hui la paix. La paix, elle est inclusive. Nous ne voulons pas rester seulement au milieu des femmes. Nous voulons que ça soit et les femmes et les hommes pour rechercher ensemble la paix. Donc,  nous sommes passé des Femmes patriotes au Mouvement citoyen pour une nouvelle Côte d’Ivoire avec d'autres organisations de la société civile.  Depuis 1999, nous évoluons, mais notre discours est le même. Quand nous avons dit non à la rébellion, non à la guerre, aujourd'hui, nous disons oui à la paix, c'est le même discours. Il n'a pas changé. Mais, nous évoluons vers d'autres structures pour rassembler beaucoup plus d'Ivoiriens.  

Ce que vous entreprenez n'est-il pas du déjà vu ou du déjà entendu avec le président de l'Assemblée nationale, Guillaume Soro, qui le 3 avril 2018 a  également prôné la réconciliation entre Ivoiriens ?  

Je ne sais de quoi il s'agit. Le président de l'Assemblée nationale n'a pas déroulé son programme ou son projet. Nous, nous venons de naître, nous avons un programme d'activités que nous allons présenter après notre séminaire qui va se tenir bientôt.  Nous allons présenter notre programme d'activités et voir ce que nous voulons faire exactement sur le terrain. Nous avons notre projet parce que nous l'avons mûri depuis la prison. Notre équipe est constituée d'anciens détenus de la crise post-électorale et nous voulons aller à la paix avec les enfants de Côte d'Ivoire. Sinon, nous n'avons pas pris contact avec Guillaume Soro. Nous voulons aller parler aux gens sur le terrain. Ce n'est pas un discours. Ce sont des activités de terrain que nous allons mener. 

Son projet, c’est d’aller demander pardon au Président Gbagbo à la Haye, d’aller discuter avec le président Ouattara, et même avec le président Henri Konan Bédié. Que pensez-vous de cela ?

Ce serait une bonne chose s’il veut demander pardon aux uns et aux autres. C’est une bonne chose. Nous l’encourageons à cela. Mais il faudrait que ça soit vrai, que ça ne s’arrête pas à des discours. Que des actes soient posés pour que les paroles se taisent, et que les actes parlent.
 
Vous créez un mouvement dans une atmosphère délétère. Aujourd’hui il y a la fracture sociale, politique même avec le PDCI et le RHDP qui sont à couteaux tirés. Quelle lecture faites-vous de cette situation et comment vous pensez y arriver ?

Justement, c’est parce que nous faisons une lecture gravissime de la situation que nous disons que le moment est venu d’appeler à l’apaisement. Au niveau des partis politiques aussi, il y a fracture, il y a fracture au niveau des familles, de la société ivoirienne et on l’a vu récemment. Il y a fracture au niveau des différentes coalitions qui existaient. Dans un tel contexte, il faut se mettre au-dessus de la mêlée, il faut regarder l’intérêt supérieur de la Nation. Donc être à équidistance des différentes chapelles politiques pour pouvoir mener à bien cette activité. Nous sommes au MCNCI. Nous ne sommes pas des militants de partis politiques mais plutôt  de la société civile. Donc nous irons voir tous les partis politiques et nous irons voir la population elle-même parce que c’est le peuple qui détient le pouvoir. Malheureusement, en Afrique, je pense qu’on n’a pas bien éduqué les gens. Les gens croient que le pays appartient aux tenants du pouvoir. Mais non. Le pouvoir appartient au peuple. C’est le peuple qui décide de le confier à qui il veut. Il faut que le peuple sache que le pouvoir est à lui, et ce peuple-là, il faut l’éduquer pour son bien-être et il faut l’éduquer pour l’intérêt de son pays. Parce que s’il y a le bien-être au niveau du peuple, le pays s’en sort grandi et le pays sera stable. 

Vous avez récemment effectué une visite à l’ex-président Laurent Gbagbo, ne pensez-vous pas que son absence est un facteur bloquant pour la réconciliation ?

Absolument. Et justement quand nous allons parler avec les tenants du pouvoir parce que ce sont eux qui détiennent la clé de la cohésion sociale, ils en ont les moyens. A partir de cet instant, nous voulons les rencontrer pour voir avec eux comment on dénoue ce nœud. Parce qu’on a vu que 82 témoins sont allés à la Haye, ils n’ont rien apporté comme preuve, comme début de preuve pour condamner le président Gbagbo. La CPI, ce n’est pas une justice de nos pays qui dépend des pouvoirs en place. Les juges sont indépendants et on a vu déjà le son de cloches de certains juges. Il y a déjà deux juges sur trois qui sont favorables à une mise en liberté du Président et du ministre Charles Blé Goudé. Nous devons tenir compte des réalités. Il y a eu des contradictions et c’est normal qu’il y ait des contradictions dans un pays, mais à un moment donné, il faut s’asseoir et puis se parler. Il ne faut pas refuser de parler à son adversaire. L’adversaire n’est pas un ennemi. Il y eu des turbulences au Ghana. Mais regardez le Ghana aujourd’hui. Hier j’ai vu la photo de famille de tous les anciens présidents avec le nouveau président. Ils mangent ensemble, ils vont regarder les matches ensemble. On n’est pas des ennemis. Si je dis que je ne suis pas d’accord avec le pouvoir en place sur telle ou telle question, je ne suis pas leur ennemi. Je suis une Ivoirienne, je suis libre de critiquer le pouvoir en place. Et je ne dois pas faire la prison pour cela. On est arrivé à un stade où tout le monde a peur, dès que vous dites quelque chose, vous vous retrouvez en prison. Maintenant, il y a les décès en cascade, c’est une psychose.

Mme la ministre, vous avez dit, on n’est pas ennemi du pouvoir en place parce qu’on n’a pas les mêmes idéologies. Aujourd’hui le PDCI-RDA qui est sorti du RHDP est en train de mettre en place une plateforme avec des personnes, des institutions qui partagent la même vision. Qu’est-ce que vous en pensez ?

Les fils et les filles de Côte d’Ivoire doivent se retrouver. Donc rassemblés au chevet de la mère-Patrie parce que la mère-Patrie, elle est malade. Regardez les dissensions, la haine qu’il y a, regardez tous ces gens qui meurent, peut-être d’angoisse, de peur. On n’a jamais vu en Côte d’Ivoire, des hauts cadres mourir en cascade. Moi, je n’irai pas jusqu’à dire qu’on les tue. Mais il y a un problème et il faut chercher à savoir ce qui se passe. Je pense que si le PDCI revient à de meilleurs sentiments, si le PDCI voit aujourd’hui qu’il est nécessaire de rassembler les ivoiriens au chevet de la mère Patrie, c’est une bonne chose. Je les en remercie. Et puis je leur demande, en tant que le plus vieux parti de la Côte d’Ivoire, de continuer à tendre la main à tout le monde, de rassembler tout le monde dans l’intérêt de ma mère-Patrie.

Pendant qu’on en parle, le parti de Laurent Gbagbo est divisé, est ce que vous avez mis en place une formule ou une politique pour réconcilier les deux tendances ?

Tous les partis sont divisés en Côte d’Ivoire. Il n’y a pas de parti qui ne soit pas divisé. Le PDCI, le FPI, le MFA, le PIT. Au niveau du FPI qui a été notre allié et nous étions LMP, nous avons parlé et nous continuons de parler. Nous pensons qu’il ne faut pas arrêter de parler. Nous avons déjà parlé et nous continuons de parler pour que les gens se mettent ensemble parce que le FPI est aussi un grand parti. Nous sommes sur le terrain et nous le savons. Nous prions pour que les gens se mettent ensemble, pour que les dissensions s’effacent pour qu’ils se retrouvent. Ce serait une bonne chose pour la Côte d’Ivoire. 

Vous parlez de réconciliation. Après le décès d’Aboudramane Sangaré, tous les partis politiques lui ont rendu hommage y compris Pascal Affi N’Guessan son adversaire au sein du FPI. Est-ce que cela ne peut pas être le début d’une réconciliation entre les deux tendances?

Nous avons des valeurs culturelles que nous tendons à oublier. En Côte d’Ivoire, c’est quand il y a la mort qu’on règle nos conflits, même les plus difficiles à régler. Je n’ai pas souhaité cette mort. J’ai eu très mal. Je vous ai dit que je vis au village. J’étais à l’église quand on m’a appelé. Dès que j’ai appris, je suis venu pour aller au domicile du Professeur Aboudrahamane Sangaré le même jour. J’ai mal, j’ai mal pour tous ces cadres qui meurt soudain. Pour toutes ces personnes avec qui j’ai travaillé. Aboudrahamane Sangaré, nous avons fait deux ans de prison à Katiola. Ça crée des liens. En Afrique, c’est quand il y a la mort qu’on se réconcilie. J’espère que ce n’est pas une mort gratuite et que ces décès vont souder davantage le FPI. Parce que jusque-là c’est vraiment au fpi qu’on compte ces décès, FPI, LMP. Parce que Jean Jacques Béchio, mon cousin est LMP. C’est le FPI qui paye le lourd tribut de cette situation. Donc, j’espère qu’on va en profiter pour régler les différends.        
 
Est-ce  que vous en aviez parlé avec le président Laurent Gbagbo lors de votre visite à la Haye?

J’avoue que non. Vous savez, le président Laurent Gbagbo connait ma position. Je ne suis pas FPI. Donc on ne parle pas du FPI quand on se rencontre. On a parlé beaucoup de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique et puis bien sûr de nos rapports personnels en temps que belle-famille. Mais on n’a pas parlé du FPI. Personnellement, je n’ai pas engagé de discussion là-dessus et lui non plus ne m’en a pas parlé. 

A votre retour de la Haye, vous avez animé une conférence de presse où vous avez affirmé que le président Laurent Gbagbo a demandé à ses partisans d’abandonner tout esprit de vengeance pour œuvrer pour l’unité. Est-ce que ce n’est pas lui qui est un peu l’initiateur de votre mouvement ?

Nous parlions déjà de réconciliation avant que je ne voyage. C’est pour cela que je lui ai dit voici un peu ce que nous avons envie de faire parce que nous sentons les cœurs chargés, les cœurs meurtris et nous avons des gens dans notre entourage qui veulent se venger. Et c’est la réponse qu’il m’a donnée « d’abandonner tout esprit de vengeance et que la seule revanche à prendre, c’est d’œuvrer à la réussite de notre pays dans l’unité et dans la paix ». Il a vraiment insisté. Je lui ai posé la question, est ce que je peux publier cela parce que c’est important. Il a dit oui et quand je suis venu, j’ai publié. Et il pense que de la réussite de la Côte d’Ivoire, émanera celle de la sous-région parce qu’il connaît le poids économique de la Côte d’Ivoire par rapport aux autres pays de la sous-région. 

Son procès reprend le 12 novembre, c'est-à-dire le lundi, pensez-vous que lui et Blé Goudé peuvent être acquittés ? 

En principe. Si vraiment nous avons affaire à une justice impartiale, il n’y a pas de raison que Laurent Gbagbo et Blé Goudé soient à la CPI. 

 Selon vous, quel sera la CEI qu’il faudra pour des élections apaisées en Côte d’Ivoire , après tous les problèmes qui découlent des dernières élections locales ?

Il faut une vraie CEI, une CEI qui est vraiment indépendante pour pouvoir mener à bien ces élections. Mais tant qu’on aura cette même CEI, on aura toujours les mêmes problèmes. Les mêmes causes, produisant les mêmes effets, ca sera pareil. Je pense que c’est Dieu qui a inspiré ceux qui n’ont pas voulu aller à ces élections. Surtout le FPI. Parce que cela a démontré aux yeux du monde entier que ce n’est pas le FPI qui a usé de violence dans les élections passées. Le FPI n’était pas présent et puis il y a eu des violences jusqu’à morts d’hommes. Nous disons, plus jamais ça en Côte d’Ivoire. Les élections, c’est un jeu démocratique. On ne doit pas mourir pour des élections. Ce n’est pas possible. Il faut que ça s’arrête. 
C’est quoi la politique ? C’est un don de soi, c’est se mettre au service des populations pour assurer leur bien-être. Dans cette définition, où se trouve la mort? Tu ne peux pas vouloir le bien-être des populations et puis les tuer parce qu'on n’est pas du même bord, parce qu’on n’a pas voté pour untel ou untel. 
Je pense que Dieu a agi pour mettre le doigt sur la vérité. On ne doit pas avoir peur de la vérité par ce que la vérité finira par triompher. En tout cas nous qui étions considérés comme des va-t-en guerre, aujourd’hui, on n’a pas été concerné par ces élections. Moi, je me suis mise loin de cela, des débats politiciens. Je n’étais pas là et puis il y a eu des morts. Donc, moi aussi, je suis blanchie et c’est ça qui me conforte dans ma position pour dire il faut qu’on aille à la paix.
 
Vous êtes donc d’accord avec ceux qui disent qu’avec cette CEI-là, en 2020, ce sera le chaos total ?
Il ne faut pas aller en 2020 avec cette CEI. Je crois qu’elle n’a pas été  renouvelée depuis et n’a plus la compétence nécessaire pour organiser des élections. Elle est composée jusqu’à ce jour d’éléments du MPCI, MPIGO qui n’existent plus aujourd’hui. En plus tous les partis politiques sont divisés aujourd’hui, donc cette CEI est dépassée.  Nous avons constaté beaucoup de manquements et de failles dans l’organisation de ces dernières élections et il faut pouvoir le dire. La CEI doit être le miroir de la réalité ivoirienne. La Côte d’Ivoire et ses enfants ont besoin de se retrouver. C’est notre pays et nous devons parler de notre pays. Il ne faudrait pas que parler de son pays emmène quelqu’un en prison.
Je voudrais rassurer ceux qui sont au pouvoir pour dire qu’on peut les critiquer parce que quand vous êtes des personnalités publiques, vous êtes exposées aux critiques. Il faut qu’ils arrêtent d’envoyer des gens en prison parce qu’on les a critiqués.  Il faut qu’on arrête tout cela. Tout le monde a peur et on ne peut pas vivre comme ça dans la psychose dans notre propre pays.

Mme la Ministre, aujourd’hui, vous considérez-vous comme militante PDCI RDA ou FPI ?
Je suis née PDCI et plus tard, pour des raisons qui me sont propres, je suis sortie de là. Mais je suis heureuse aujourd’hui parce que je vois que le PDCI RDA me rejoint sur les raisons qui m’ont poussées à partir. Mais je préfère être indépendante. A la lecture de ce qui se passe dans notre environnement politique, je préfère ma liberté car je suis un esprit libre.

Un retour au PDCI RDA n’est donc pas envisageable ?

Non, pas du tout pour le moment. Je ne suis pas FPI non plus parce que il y a encore des personnes qui pensent que je le suis. J’étais LMP en tant que présidente des femmes patriotes, donc de la société civile.

Que reprochez-vous aux partis politiques ?

Rien du tout. Je ne suis pas en train de reprocher des choses aux partis. Ils ont leurs organisations et structurations, mais je ne me sens pas libres dans ces partis.

De plus en plus, nous entendons parler d’une alliance PDCI RDA-FPI. Qu’en pensez-vous ?

Je n’en sais rien du tout. Je n’en ai jamais discuté, ni avec le PDCI RDA, ni avec le FPI. Je pense plutôt qu’il ne faut pas se limiter à des alliances momentanées. Les ivoiriens doivent se retrouver pour se parler, toutes tendances confondues. Nous l’avions fait sous feu le Général Guei Robert. Nous nous sommes retrouvés pour élaborer une constitution. Tout le monde y était, sans exclusion. Je répète qu’il faut qu’on se parle. Il nous faut trouver la forme pour nous retrouver. Il ne s’agit pas de créer une alliance contre une autre alliance ou une coalition contre une autre coalition. Il s’agit de mettre les Ivoiriens ensemble parce que nous avons un destin commun et c’est notre pays. La Côte d’Ivoire appartient au peuple de Côte d’Ivoire. Nous devons mettre tout le monde ensemble pour s’enfermer et se  parler. Il nous faut toucher du doigt, les maux. Il nous faut nous débarrasser de nos tares parce que nous en avons trop, changer de mentalités parce que notre société a des problèmes sérieux. 

Que pensez-vous de la situation du Président Alassane Ouattara ?

Je n’ai pas envie d’en parler. Pas parce que j’ai peur, mais les ivoiriens ne sont pas prêts à accepter les critiques. Mon seul souci, c’est la réconciliation des ivoiriens.

Quel message avez-vous pour les ivoiriens ?

C’est un message de paix et je voudrais dire aux tenants du pouvoir que ce sont  eux qui détiennent les clés de la cohésion sociale. Il leur faut mettre en place un système qui puisse permettre aux ivoiriens de tous bords de se retrouver pour parler de la Côte d’Ivoire parce que nous sommes allés trop loin, jusqu’à toucher le fond. S’il n’y a pas de communication, il ne peut pas y avoir de paix. Je voudrais dire à tous mes amis qui ont souffert dans les prisons pendant plusieurs années, d’essayer d’apaiser leurs cœurs parce que Dieu veut nous aider. Mais nous-mêmes devons rechercher la conversion. Laissons Dieu faire les choses. Nous, allons à la réconciliation. Je demande au gouvernement de chercher tous les voies et moyens pour nous conduire à la paix.

Solange ARALAMON  et Lambert KOUAME

 

 

 

 

 

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